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Chapter 12 - le kidnapping

La lumière blanche du cabinet filtrait à travers les stores, coupant la pièce en bandes pâles et immobiles.

Jecica, assise sur le bord du fauteuil, baissa les yeux, cherchant ses mots.

Elyra, la médecin en charge du programme, croisa les bras, son regard neutre mais pénétrant.

— « La plupart des couples qui cherchent un enfant ne voient que la part joyeuse de l'enfantement. »

La voix d'Elyra était douce, mais chaque mot pesait.

Jecica releva la tête. Ses yeux sombres, fatigués mais déterminés, croisèrent ceux de la médecin.

— « Je sais, docteur. Mais nous sommes conscients de ce que cela implique. Nous savons ce que cela représente d'avoir un enfant. »

Son ton ne tremblait pas.

À côté d'elle, Nolan restait silencieux. Il fixait le sol, absent. Ses doigts jouaient nerveusement avec la manche de sa chemise.

Il avait l'air ailleurs — comme s'il était dans une autre pièce, ou dans un autre monde.

— « Monsieur Park ? » appela doucement Elyra, fronçant les sourcils.

— « Oui… » répondit-il, relevant la tête sans conviction. « Oui, nous savons ce que nous voulons. »

Elyra hocha lentement la tête.

— « Très bien. Sachez simplement que je ne vous mettrai en contact qu'avec les mères porteuses certifiées par l'État. »

Nolan prit enfin la parole d'une voix basse, presque mécanique :

— « Est-ce que je peux voir la liste des mères porteuses qui nous ont été attribuées ? »

Le visage d'Elyra se referma légèrement.

— « C'est… un peu plus compliqué. Puisque Jecica est une surhumaine, le test doit se faire sans qu'elle connaisse l'identité des candidates. C'est une question d'équilibre biologique et de sécurité génétique. »

Un silence pesant tomba dans la pièce.

L'horloge au mur continuait son tic-tac régulier, obstiné, comme pour rappeler que le temps, lui, n'attendait personne.

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Le soleil déclinait lentement sur la ville. Les rues baignaient dans un silence artificiel, seulement troublé par le bruissement du vent et le clapotis de l'eau contre le bord du canal.

Nolan et Jecica sortirent de l'hôpital, leurs silhouettes allongées par la lumière orangée du crépuscule.

Elle prit une grande inspiration, fermant un instant les yeux.

— « Tu devrais te reposer… » murmura-t-elle, posant une main sur son bras.

Sa voix se voulait douce, mais elle trahissait une inquiétude qu'elle ne parvenait pas à dissimuler.

— « Je… je ne peux pas. Pas encore. » répondit Nolan, les yeux perdus dans le vide.

Il ouvrit la portière, s'installa au volant.

Le moteur de leur voiture électrique se mit à ronronner doucement, presque silencieux. Ils quittèrent le parking, rejoignant l'avenue principale.

Ils ne savaient pas qu'ils étaient déjà suivis.

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À quelques centaines de mètres, trois hommes observaient depuis un véhicule noir sans plaque.

Leurs visages restaient dans l'ombre, à peine éclairés par les écrans intégrés à la planche de bord.

Ils étaient trois — trois KJ — unis par une mission claire, sans émotion ni hésitation.

— « Ils bougent. »

— « Parfait. On les suit, sans pression. »

— « Le Maître veut le scientifique vivant. La fille… au cas où. »

Leur ton était calme, presque désinvolte. Pourtant, leurs gestes trahissaient la rigueur du tueur expérimenté.

Chacun vérifiait son matériel, ses implants, ses dispositifs d'immobilisation.

Une routine. Rien d'autre qu'un contrat bien payé.

Mentos, le plus jeune, observait la route à travers les jumelles augmentées.

— « Après, j'me tire. Avec la prime, j'me prends une baraque, une vie tranquille. Fini les contrats. »

Un rire bref, sans joie, s'échappa de sa gorge.

Carnage, à côté, ajusta le harnais de son fusil à impulsion.

— « T'en dis toujours trop, Mentos. Ferme-la et reste concentré. »

Derrière eux, le Maître — silencieux, massif — ne dit rien. Ses yeux étaient fixés sur la voiture de Nolan.

Son souffle régulier emplissait l'habitacle comme un grondement contenu.

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Dans la voiture, Jecica regardait par la fenêtre.

Les lumières de la ville s'éloignaient, remplacées par les reflets de la forêt.

Une sensation étrange monta en elle.

Le genre de frisson qui serre la nuque avant qu'un drame n'éclate.

Elle fronça les sourcils.

— « Quelque chose ne va pas… » murmura-t-elle.

Nolan tourna brièvement la tête vers elle.

— « Quoi ? »

— « Je ne sais pas. J'ai… l'impression qu'on nous suit. »

Elle força un sourire, comme pour chasser la peur, mais son regard revint aussitôt vers le rétroviseur.

Derrière eux, à une centaine de mètres, les phares d'un véhicule noir brillaient faiblement, gardant la même distance depuis plusieurs minutes.

Le silence se fit plus lourd.

Le cœur de Jecica battait à contretemps, comme un avertissement.

— « Nolan… » commença-t-elle.

Mais elle n'eut pas le temps de finir.

Le choc fut brutal.

Le véhicule noir venait de percuter l'arrière de leur voiture.

Un bruit de métal froissé, un éclat de verre, un souffle coupé.

L'IA de bord réagit immédiatement :

> « Collision détectée. Activation du protocole défensif. »

Les commandes passèrent automatiquement en mode fuite.

Le volant vibra dans les mains de Nolan, puis s'anima seul, contournant les obstacles à une vitesse folle.

Le véhicule s'enfonça dans la forêt adjacente, bondissant sur le chemin irrégulier.

Les pneus mordaient la boue, les phares découpaient des ombres mouvantes.

Derrière eux, Mentos relança le moteur et fonça.

Le véhicule noir suivait de près, grognant comme une bête mécanique.

— « Il file dans la forêt ! » hurla Mentos.

— « Laisse-le courir, » répondit le Maître. « Il ne sortira pas vivant. »

---

Les arbres défilaient à une vitesse vertigineuse.

Nolan serrait le siège, son souffle court.

— « Tiens bon, Jecica ! » cria-t-il.

Mais une secousse violente fit éclater la vitre côté passager.

Une pierre énorme venait d'être projetée en plein sur le pare-brise.

Le Maître, posté à l'extérieur du véhicule poursuivant, avait levé une main, concentrant une force invisible.

La roche suivante s'éleva du sol, déracinant la terre dans un grondement sourd, avant d'être catapultée contre la voiture de Nolan.

— « Putain ! » Nolan baissa la tête à temps, le projectile traversa le pare-brise, brisant les commandes tactiles.

Les éclats de verre lacérèrent ses joues.

Jecica cria. Son bras gauche fut touché. Le sang éclaboussa le tableau de bord.

Mais l'IA continuait d'avancer, déterminée, contournant les obstacles comme une créature vivante.

Les arbres s'effaçaient, l'air se faisait plus dense.

Puis, le Maître, d'un geste sec, arracha un tronc mort et le lança droit sur eux.

L'impact fut monstrueux.

Un bruit sourd, suivi d'un hurlement de métal.

Le véhicule fit un tonneau avant de s'écraser contre une souche.

Les airbags explosèrent dans un nuage de poudre blanche.

Le silence.

Puis, un sifflement aigu.

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Nolan ouvrit difficilement les yeux.

Sa vision vacillait. Le monde tournait autour de lui.

Des éclats de verre collaient à sa peau.

— « Jecica… » souffla-t-il.

Il se traîna hors du véhicule, titubant, la main pressée sur son front ensanglanté.

Mais à peine eut-il posé le pied dehors qu'un claquement sec retentit.

Un filet électromagnétique se déploya autour de lui, le plaquant au sol.

Ses muscles se figèrent, ses bras refusant d'obéir.

Il entendit un pas lourd s'approcher.

Carnage se pencha sur lui, casque vissé au visage, sourire froid.

— « Calme-toi, doc. Ce n'est qu'un petit voyage. »

Nolan voulut répondre, mais un coup sec à la nuque l'en empêcha.

Dans la voiture, Jecica tentait de bouger. Un morceau de tronc écrasait son torse. Son bras saignait abondamment.

Ses yeux papillonnaient.

— « Nolan… » souffla-t-elle faiblement.

— « Emmenez la femme aussi, » ordonna le Maître d'une voix grave. « Ce sera notre levier. »

Carnage hocha la tête et s'exécuta.

Il la tira hors du véhicule, sans douceur, la chargeant sur son épaule.

Le sang ruisselait sur ses gants.

Nolan, paralysé, cria son nom, encore et encore.

— « Jecica ! Jecica ! »

Mais sa voix se perdit dans le vacarme du moteur qui redémarra.

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Quelques minutes plus tard, le silence revint sur la forêt.

Le véhicule noir disparut sur la route déserte, ne laissant derrière lui que les débris, la poussière, et l'écho d'un cri.

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