Cherreads

Chapter 11 - la mère porteuse

Jecica et Nolan partent voir la mer porteuse.

Encore une nuit blanche pour Nolan. Il avait vu le jour se lever à travers les baies vitrées de son laboratoire privé. Mais il avait encore raté son nouveau mélange clinique. Depuis le face-à-face avec Lofeso et la guérison de Viperion, Nolan avait commencé à avoir les mains tremblantes et parfois, quand il essayait de fermer les yeux, il voyait les corps des héros tués par Lofeso et ses créatures.

Pour oublier, il prenait des médicaments ordinaires… conçus par Better Life, leader dans l'industrie pharmaceutique et technologique dans le monde entier. Pourtant, il avait toujours des maux de tête…

Devant le miroir de leur chambre, Jecica se maquillait. Chaque geste sur son visage était une carapace. Elle regardait légèrement vers Nolan, cherchant quelque chose qu'elle n'avait plus depuis longtemps. Pendant un instant, elle s'arrêta de se maquiller. Un souvenir revint dans son esprit :

leur premier rendez-vous…

Nolan avait ce style qui le rendait irrésistible à ses yeux.

Nolan avait enfin trouvé le sommeil après une nuit forte. Pas en étant Prime, mais en étant juste Nolan… Il avait les yeux fermés, mais son esprit était dans les pensées.

— « Tu es toujours aussi belle… » dit Nolan, les yeux fermés, un sourire se dessinant sur ses lèvres.

Jecica sourit et continua à s'apprêter. Elle avait toujours son style. Les pantalons étaient ce qu'elle aimait le plus, avec des tenues sexy et simples qui révélaient ses formes de manière subtile, sans être vulgaires.

— « Tu as dix minutes pour t'habiller, je te rappelle qu'on doit aller voir la mère porteuse aujourd'hui… » dit Jecica, ajustant son rouge et son mascara.

Nolan se leva du lit. Il était torse nu et s'avança vers Jecica. Il l'embrassa délicatement :

— « Je sais, mais je te rappelle que tu pourrais venir m'aider à Better Life… » dit Nolan tendrement, en regardant Jecica dans les yeux.

— « Tu sais que je ne peux pas. Depuis la disparition des héros ordinaires, les populations enchaînent les plaintes contre le gouvernement, qui ne répond pas aux engagements qu'ils ont pris face aux familles des héros, » dit Jecica en caressant sensuellement Nolan.

Cependant, Nolan dit :

— « Mais pourquoi on n'invite pas la mère porteuse à venir ici, à la maison ? »

En entendant cela, Jecica roula des yeux…

— "« Nolan, arrête un peu… » dit-elle en soupirant, tout en refermant son rouge à lèvres.

Elle se tourna vers lui, croisant ses bras.

— « Tu crois que c'est une visite ordinaire ? On parle d'une femme qui va porter notre enfant, pas d'un dîner de retrouvailles. »

Nolan se passa la main dans les cheveux, un air fatigué et nerveux sur le visage. Les cernes sous ses yeux disaient plus que ses mots.

— « Je sais… mais je préférerais que tout se passe ici, dans un endroit que je contrôle. Le monde dehors est devenu imprévisible, Jecica. On ne sait plus à qui faire confiance. »

Elle s'approcha doucement de lui, posant une main sur sa joue.

— « Tu n'as jamais su faire confiance à personne, Nolan. Pas même à moi. »

Un silence.

Les yeux de Nolan se baissèrent.

La lumière du matin traversait les rideaux, éclairant la pièce d'un voile doré. L'appartement de verre et d'acier semblait froid, presque clinique — à l'image de l'homme qu'était devenu Nolan depuis les événements avec Lofeso.

Il enfila une chemise blanche, la laissa ouverte sur son torse, puis alluma son terminal holographique posé sur la table basse. Des symboles scientifiques flottaient dans l'air, des équations lumineuses qu'il fixait avec un mélange de fascination et de dégoût.

— « Tu crois encore que Better Life peut sauver le monde ? » demanda Jecica en attachant ses boucles d'oreilles.

Nolan eut un petit rire amer.

— « Sauver ? Non. Mais peut-être qu'on peut encore le comprendre avant qu'il ne s'effondre. »

Elle secoua la tête, ramassa son sac.

— « Le comprendre ? Pendant que tu analyses la chute, les gens souffrent dehors. Le monde n'a pas besoin d'un autre génie enfermé dans sa tour d'ivoire, Nolan. Il a besoin d'humains. »

Il la regarda, silencieux, sans trouver la force de répondre.

Quelques minutes plus tard, ils quittèrent leur appartement, descendant dans le parking souterrain. Le bruit du moteur électrique brisa le silence.

La route vers la côte se fit sans un mot. Le paysage urbain laissa peu à peu place à des étendues verdoyantes, puis à la mer.

Jecica ouvrit la fenêtre, laissant le vent frapper son visage.

— « Tu te souviens, la première fois qu'on est venu ici ? » demanda-t-elle, la voix adoucie.

— « Oui. Tu m'avais dit que la mer te rappelait ton père… » répondit Nolan.

— « Oui. Parce qu'elle ne garde jamais rien. Elle prend tout, puis recommence. »

Nolan sourit faiblement.

Au loin, la mer porteuse s'étendait comme un miroir immense. C'était là qu'ils allaient rencontrer la femme qui, peut-être, changerait leur vie.

Mais dans le regard de Nolan, une ombre persistait — celle d'un homme qui, malgré tous ses efforts, continuait de fuir ses propres démons.

Le véhicule s'arrêta au bord d'une route sablonneuse. Devant eux, la mer portait un éclat étrange — gris argenté, presque métallique. Les vagues semblaient respirer lentement, comme un être vivant.

Nolan resta un moment immobile dans la voiture, observant le mouvement du large. Jecica posa sa main sur son bras.

— « On y va ? » demanda-t-elle doucement.

— « Oui… » répondit-il, la voix basse.

Ils descendirent. Le vent marin souleva les mèches de cheveux de Jecica. Elle avança la première, ses talons s'enfonçant dans le sable fin. Devant eux, une maison blanche se dessinait — simple, presque modeste. On aurait dit qu'elle appartenait à un autre temps, celui d'avant les cités verticales et les tempêtes d'acier.

Une femme les attendait sur la terrasse. Grande, mince, vêtue d'une robe bleue pâle qui se laissait porter par la brise. Ses traits étaient doux, mais marqués par la fatigue. Ses yeux, d'un vert clair presque translucide, semblaient tout voir sans juger.

— « Madame Elyra ? » lança Jecica.

La femme sourit et fit un signe de tête.

— « Oui. Vous devez être le couple Nolan et Jecica Park. Entrez, je vous en prie. »

À l'intérieur, l'air sentait la lavande et le sel. Une lumière douce baignait les murs, et sur la table du salon, trois tasses les attendaient déjà.

— « Je vous attendais. Better Life m'a prévenue de votre arrivée hier soir. » dit Elyra calmement, versant du thé.

Nolan la regardait avec une attention presque scientifique.

— « Vous savez pourquoi nous sommes ici. Je ne suis pas du genre à tourner autour des mots. Nous voulons… une stabilité génétique complète, aucune déviation, aucun risque d'auto-rejet. »

Elyra le fixa, sans ciller.

— « Vous parlez comme un homme qui veut fabriquer, pas donner la vie. »

Le silence tomba.

Jecica fronça les sourcils.

— « Pardon ? »

— « Je n'ai rien contre vos intentions. Mais porter un enfant, ce n'est pas une équation. C'est un lien. » répondit Elyra avec douceur.

Nolan se mit a réfléchi silencieusement , puis il dit :

— « Vous ne comprenez pas. Cet enfant… c'est notre dernière chance. Après tout ce que le monde a perdu, il doit naître sans faiblesse. »

La femme hocha la tête.

— « Je comprends. Mais vous devriez savoir que la perfection a un prix, Monsieur Park. »

Elle posa sa main sur son ventre, comme pour rappeler quelque chose d'invisible.

— « Et parfois, ce prix n'est pas celui qu'on croit. »

Une vague plus forte s'écrasa au dehors. Le bruit vibra à travers la maison.

Jecica détourna les yeux vers la mer.

— « Nolan… laisse-la parler. »

Elyra reprit :

— « Avant d'accepter, j'ai besoin de savoir une chose : cet enfant, vous le voulez parce que vous l'aimez déjà… ou parce que vous avez peur d'être seuls ? »

La question resta suspendue dans l'air.

Nolan resta figé, incapable de répondre.

Pour la première fois depuis des mois, il sentit son propre cœur battre trop fort. Pas celui d'un scientifique, ni d'un visionnaire. Mais celui d'un homme qui avait peut-être oublié comment on aime.

Dehors, la mer portait toujours son chant lourd et vivant.

Elle semblait murmurer quelque-chose.

More Chapters