La pluie tombait encore lourdement sur la ville.
Hana avançait en silence, tenant Ren par le poignet pour le tirer à l'écart des rues principales. Personne ne parlait. Ren, encore sous le choc de ce qui s'était passé, respirait vite, essayant de calmer son cœur.
Il avait vu une créature irréelle, monstrueuse, et son corps avait réagi seul… comme si quelque chose l'avait contrôlé.
Ou… protégé ?
Ils s'arrêtèrent finalement sous un vieux porche abandonné, à l'abri de la pluie.
Hana lâcha son poignet.
— Ça va ? demanda-t-elle, légèrement essoufflée.
— Je… je crois, répondit Ren en mettant une main sur sa poitrine. Je ne comprends toujours pas ce que c'était.
Hana regarda la pluie tomber quelques secondes, comme si elle cherchait les mots justes.
— Cette chose… c'était un Spectre Astra. Une créature née d'une âme déformée. Et toi…
Elle se tourna vers lui, ses yeux bleus brillant dans la pénombre.
— …toi, tu as manifesté quelque chose d'inhumain.
Ren sentit un frisson le traverser. Il revit l'instant où son bras s'était entouré d'un noir épais, tourbillonnant comme une flamme inversée.
— Ce n'était pas moi, protesta-t-il. Je ne sais pas ce que c'était… j'ai senti quelque chose bouger en moi, comme si j'étais… deux.
Hana avança d'un pas.
— Ren… écoute-moi bien.
Tu n'es pas "deux". Tu es lié.
Elle plaça sa main sur son propre cœur.
— À une Astra.
Le mot résonna comme un écho dans sa tête.
— Une… Astra ? répéta Ren.
Hana hocha la tête.
— Une âme jumelle. Un esprit intérieur. Une force qui ne devrait pas exister dans le corps d'un humain, mais qui s'y attache quand certains… portent un destin particulier.
Ren recula d'un pas.
— Tu veux dire que… ce truc en moi… c'est une espèce d'esprit ?
— Oui. Et pas n'importe lequel, dit-elle d'un ton grave.
Ce que j'ai vu… ce n'était ni normal, ni faible.
Elle inspira profondément.
— Ren, tu possèdes un Astra gigantesque. Trop puissant. Trop instable.
Il sentit ses mains trembler.
— Tu veux dire… que je suis dangereux ?
Hana baissa légèrement les yeux.
— Pas forcément. Mais ce que j'ai vu… je dois en avoir le cœur net.
Elle avança la main vers lui.
— Donne-moi ton bras. Le droit.
Ren hésita, avala sa salive, puis tendit son bras lentement.
Hana plaça ses doigts autour de son poignet. Une légère lueur argentée sortit de sa paume :
une lumière douce, calme, rassurante.
— C'est ton… Astra ? demanda Ren.
— Oui. L'Astra de la Lumière Lunaire.
Sa main éclaira l'avant-bras de Ren, révélant encore, sur la peau, des veines sombres, comme de l'encre qui se dissipait peu à peu.
Hana releva la tête, ses yeux légèrement écarquillés.
— C'est bien ce que je pensais…
Ren sentit sa gorge se serrer.
— Quoi… ? C'est grave ?
Elle inspira lentement.
— Ton Astra… ce n'est ni feu, ni glace, ni lumière, ni ombre.
Ce n'est même pas une Astra combattante normale.
Elle retira doucement sa main.
— Ren… tu portes le Chaos.
Le silence tomba. Même la pluie semblait s'être arrêtée.
Ren cligna des yeux, incapable de comprendre.
— Le… chaos ?
— L'Astra la plus imprévisible. La plus dangereuse. Celle qui aurait dû rester scellée pour toujours.
Ren recula encore.
— Non… ça ne peut pas être… je suis juste un gamin normal…
— Je sais, dit Hana calmement. Je te crois.
Mais ce qu'il y a en toi ne l'est pas.
Un grondement résonna soudain dans la rue.
Ren se redressa.
— C'était quoi ?
Hana serra les dents.
— On n'a pas le temps. Le Spectre de tout à l'heure n'était pas seul.
Comme pour lui donner raison, une silhouette sombre traversa la rue à toute vitesse, laissant une traînée de fumée noire.
Hana attrapa Ren par le bras.
— Viens. On doit bouger.
— Où ? demanda-t-il.
Elle pointa un doigt vers l'autre bout de la rue.
— Au vieux gymnase abandonné. C'est le seul endroit où je peux créer une barrière.
Ren regarda l'ombre qui avançait dans leur direction. Il n'avait plus le choix.
Ils coururent dans les rues trempées, les éclairs illuminant les toits.
La créature bondit sur un mur, puis sur un lampadaire, suivant leurs traces comme un prédateur.
Ren sentit à nouveau une chaleur agressive dans son bras.
— Pas maintenant… murmura-t-il. Pas encore.
Hana se retourna en courant, remarqua son bras tremblant.
— Ren ! Ne le laisse pas prendre le contrôle ! Pas ici !
— Je fais ce que je peux ! s'exclama-t-il.
Le Spectre bondit du toit d'une maison.
Hana se plaça devant Ren.
— Lunaire… Éclat !
Une vague de lumière argentée jaillit de ses mains, frappant la créature et l'envoyant au sol. Le Spectre glissa, hurla, et reprit sa poursuite immédiatement.
— Il est trop rapide ! cria Ren.
— Juste un peu plus vite ! Le gymnase est là !
Ils traversèrent une allée, puis s'engouffrèrent dans une vieille cour bétonnée.
Le gymnase se dressait devant eux, immense et sombre.
Hana poussa la porte coulissante.
— Entre !
Ren bondit à l'intérieur. Hana leva ses mains, sa lumière se concentrant autour d'elle.
— Barrière Lunaire !
Un dôme argenté se forma à l'entrée… juste au moment où le Spectre bondissait.
BOUM !
La créature frappa la barrière de plein fouet, hurlant d'un cri strident.
Ren tomba au sol, essoufflé.
La lumière argentée vibra dans le gymnase, froide et rassurante.
Hana se tourna vers Ren, essoufflée mais déterminée.
— Ren… maintenant qu'on est à l'abri…
Tu vas me dire tout ce que tu as ressenti quand ton Astra s'est éveillé.
Il releva sa tête, les yeux écarquillés.
— Tu vas m'aider… malgré ce que je suis ?
Hana le fixa avec douceur.
— Parce que ce que tu es… n'est pas ce que ton pouvoir veut faire de toi.
Et si tu as vraiment le Chaos en toi…
Elle s'agenouilla pour être à sa hauteur.
— …alors tu vas avoir besoin de moi plus que jamais.
Ren sentit, pour la première fois depuis le début, son cœur se calmer.
Il hocha doucement la tête.
— D'accord… Hana. Je te fais confiance.
La barrière trembla légèrement, frappée de l'extérieur.
Le chaos avançait.
Et leur histoire aussi.